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Posted by on 4 décembre 2015 in Non classé |

On part de là …

 

Commencer un accompagnement d’équipe, c’est accueillir un point de départ avant même de définir où l’on ira. Parfois, on part de loin, parfois on va loin, mais toujours, on part d’où l’on est.

 

Cette équipe en est là :

«  Si l’on avait été écouté, concerté depuis le début, on n’en serait peut-être pas là ».

«  On ne fait pas du bon travail. Moi ça me fait mal de ne pas faire du bon travail ».

« On est atteint vraiment personnellement ».

« On ne se fait plus confiance depuis un certain temps. Je n’arrive pas à travailler, sans confiance, sans se dire les choses entre nous ».

« Je suis à fleur de peau depuis quelques temps, car je n’ai plus confiance ».

« On est en train de se détruire ».

« J’ai essayé d’en parler, ça n’a pas arrangé ».

« Ça me touche profondément dans mes valeurs. C’est un attentat humain tous les jours ».

« Je n’ai pas envie de participer à ça ».

« Je n’ai plus envie d’être violentée ».

« J’ai beaucoup donné de moi pour essayer d’améliorer ce qui ne va pas chez nous ».

« J’essaye de me défendre par la parole, mais ce n’est pas facile au quotidien ».

« J’entends parfois que ça ne touche pas notre travail. C’est faux ».

« Je n’ai plus de soutien professionnel ; non, quasiment plus ».

« J’attends que les cadres remettent du cadre dans notre équipe ».

« C’est un travail qui ne peut se faire qu’avec tout le monde, qui ne peut pas se décrêter ni par la Direction, ni par les Délégués du Personnel ».

 

Cette équipe ira là, peut-être :

  • Réapprendre à dire stop, à l’autre, en étant respecté dans cette limite,
  • Réapprendre à dire stop, à soi aussi : stop à dire n’importe quoi, n’importe quand, à jeter des mots sans en comprendre la portance, la résonnance ; stop aux rumeurs, à la communication violente,
  • Réapprendre à s’entendre, à prendre le temps de parler pleinement, c’est-à-dire avoir le temps de poser sa parole et dire ce que l’on souhaite dire, avoir le sentiment d’être écouté,
  • Réapprendre à identifier des compétences présentes dans l’équipe pour réguler la communication, des compétences visibles lorsque le groupe est accompagné par un tiers,
  • Réapprendre en somme une forme de loi relationnelle, en repartant du minimum.

 

Ce qu’en pense le coach ?

  •  Rien n’est jamais perdu, mais il y aura de la perte : un ou des départs, car c’est parfois trop tard,
  • La souffrance, les séquelles devraient être regardées même s’il y a un départ ailleurs, lors de supervisions individuelles ou une séquence thérapeutique tant la souffrance est présente,
  • Un accompagnement prend du temps, et certaines hiérarchies le savent bien,
  • Le système organisationnel qui accepte cette violence mérite d’être pris en compte, questionné, confronté, responsabilisé, afin d’identifier si cela ne se reproduit pas ailleurs, dans une autre équipe,
  • Identifier des reflets systémiques, par exemple en quoi les relations dans l’équipe sont à l’image des relations entre usagers,
  • Les techniques quelles qu’elles soient (communication non-violente, identification des jeux d’acteurs, analyse transactionnelle…), sont bien utiles dans ce type de climat social, mais ne remplacent jamais la présence humaine et humaniste d’un tiers. L’essentiel est d’être là, vraiment.

 

A suivre…

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Posted by on 21 novembre 2015 in Non classé |

Une semaine après

Une semaine après les attentats du 13 novembre 2015

J’ai accompagné sept groupes cette semaine, et j’ai invité les participants à partager leur vécu sur ces événements.

L’authenticité, l’émotion, le choc, la peur, le ras-le-bol, la colère, tout y est passé. Sans jugement sur ce qui venait, j’ai d’abord été touché par l’implication de chacun dans sa parole. Tout le monde a été touché. Chacun pourra ici peut-être s’y retrouver.

Pas de commentaire, juste un partage des mots, dans le désordre comme ils sont venus.

 

Qu’est-ce que ça me fait ?

« J’avais besoin de m’informer, je suis resté sur BFM jusqu’à 3 heures, j’étais scotché ».

 « J’ai de la colère et envie de pleurer en même temps ».

 « J’ai appelé, j’avais besoin de savoir, de me rassurer sur mes proches, sur mes collègues ».

« Ca me rappelle le RER en 1995, le train gare de Lyon en 88 » ; « La Côte d’Ivoire », « moi le Liban », « la guerre en France » pour les plus anciens, et « le Togo en 91 où ça tirait à balle réelle ».

« J’imaginais que venir en France me permettrait de ne plus jamais revivre ça. Le bruit, les morts, les balles… ».

 « J’ai peur, on n’est pas en sécurité, je ne me vois pas ressortir dans Paris ».

« J’étais heureux de ne pas être à Paris ce week-end là, mais à la fois tous mes amis y étaient ».

« Sortir de chez moi pour travailler, ça m’a fait beaucoup de bien ».

« J’ai 30 ans, et ce que je représente a été attaqué. J’ai le sentiment d’être la proie ».

« Ca me fatigue, même quand on essaye de se couper, on ne peut pas ».

« Charlie pouvait cliver, ceux qui sont Charlie d’un côté et les autres ; là, ça pouvait être tout à chacun ».

« Je me sens fatigué, affaibli ».

« Ca me rassure d’avoir vu des gens dehors après les attentats, dans la rue, au stade en Angleterre, c’est possible ».

« Je suis sensible aux bruits, au bruit des sirènes ».

« Ca va passer mais je me sens vigilante, je n’ai pas les mêmes filtres que d’habitude ».

« Je ne peux pas parler, ma sœur est inquiète, il faut la rassurer, et ma mère en rajoute ».

« Je vais arrêter de porter le voile, il y a trop de mauvais regards sur moi ».

 

 

Heureusement …

« J’ai passé le week-end en famille, j’avais mes trois enfants avec moi ».

« J’ai reçu des appels de ma famille, des amis ».

« Je ne suis pas touché directement mais des amis à moi le sont. Je leur ai proposé de venir à la maison ».

 « J’ai mis une bougie, j’ai osé ressortir »

« Je devais y être » ; « ça pourrait être moi, c’est mon lieu de sortie, de vie… ». « C’est égoïste, mais j’ai de la chance ».

 

Qu’est-ce que j’en pense ?

« Va où tu veux, meurs où tu dois ».

« Il faut penser aux autres pays ; tous les jours des attentats, relativiser ».

« Qu’est-ce qu’on peut faire ? Il n’y a pas de solution, peut-être avancer différemment, et non ne plus vivre »

« Faire avec le fait de faire sans, sans le sentiment de sécurité ».

« On ne peut pas faire du mal comme ça, gratuitement ».

« D’habitude, la peur ne fait que peur ; mais là il y a un vrai risque ».

« Avant les familles tenaient les générations ; maintenant les parents n’ont prise sur rien du tout ».

« Je n’avais pas compris que ça allait si mal ».

« C’est arrivé au Petit Cambodge ; je vais être mon Petit Thérapeute ».

« Je n’ai pas aidé cette mère qui s’est effondrée, je ne l’ai pas bien écoutée, j’étais moi-même sous le choc ; mais je pourrai revenir la voir et lui parler un autre jour ».

 

Que faire de mieux ?

Mettre un avertissement « interdit -12 ans » sur l’écran de la télé, ne serait-ce que pour indiquer aux parents de protéger les enfants des images répétées, non-filtrées.

Etre attentif aux plus fragilisés, car les défenses psychiques sont sensibilisés. Mettre un peu de douceur dans les relations à la maison comme dans la rue, dans le métro.

Revenir à son sourire, aux petits mots gentils avec son voisin, sa voisine. Remettre du lien social, gratuit.

Ne pas me culpabiliser ni avoir honte de regarder de travers certaines personnes, pendant un temps peut-être, tant la vigilance est exacerbée.

Etre attentif aux personnes ayant coupé les liens avec leurs parents, leurs frères et sœurs, ceux qui se retrouvent isolés de leur système familial, premier environnement social et régulateur.

Expliquer des termes méconnus dans leur sens spirituel et souvent mal utilisés dans les médias, notamment le chemin personnel que représente « faire son djihad ». Revenir également au Coran qui n’utilise jamais le mot de martyr.

Qu’un terroriste potentiel souhaite vraiment faire son djihad, et comprenne qu’il s’agit là de combattre son désir de mort, sa haine, sa violence, sa colère, ses désaccords : combattre en somme son terrorisme intérieur.

Que les institutions, les entreprises, les familles, prennent le temps d’accompagner la violence générée par leur système et à tout niveau.

Prendre le temps de parler après. Et quand on peut, prendre le temps de faire parler.

Prendre le temps de comprendre, par exemple « comment ça commence pour être terroriste ? ».

Etre pris dans la télé et son déluge, mais aussi dire stop à un moment, quand c’est trop et même avant ; choisir quand aller rechercher l’information, choisir la taille de son écran aussi, de la télé à la tablette pour diminuer l’impact de l’image.

Questionner l’autorité à poser en tant que parent ; prendre aussi le temps d’expliquer, d’écouter.

Remercier Facebook pour avoir lancé une alerte permettant de savoir qui était en sécurité parmi « mes amis » parisiens.

Comprendre qu’un échec ou qu’un drame est une étape, que demain existe, et après-demain aussi.

Prendre le temps de lire, de mettre à distance, de s’informer et de penser autrement.

Les attentats rappellent des souvenirs passés. Voir en quoi il y a des similitudes entre deux événements, mais ne pas en rester là en montrant qu’il y a aussi et toujours des différences.

Les témoignages sont ancrés dans le réel, des faits, du vu ou du entendu. Rapidement, l’émotion est aussi présente. Proposer d’allumer une bougie, prier, méditer, envoyer de l’amour peut permettre de changer de niveau d’ordre et de passer par le symbolique ou par un rituel de soin.

 

Et vous, comment ça va ?

 

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